Paul BRESSE, 3ème partie : sa carrière d’architecte

Paul BRESSE    26 février 1891 – 19 juillet 1973

Par Corinne MOLLIET-BRESSE sa fille cadette, Mai 2021

Pour relater la carrière de mon père Paul BRESSE, je me suis basée sur le Curriculum Vitae qu’il a rédigé, les plans et photos de ses réalisations que je possède, et aussi sur les articles parus dans la presse.

Vers l’âge de 30 ans, Paul est en possession de son diplôme d’architecte-archéologue-urbaniste.

Dans son CV, il mentionne lui-même les différentes collaborations de sa carrière :

« Avec M. Jules FORMIGE, Inspecteur Général des Monuments Historiques, Président de l’académie des Beaux Arts et Président de l’Institut.

Avec M. le Chanoine Ulysse CHEVALIER, Paléontologue et Membre de l’Institut.

Avec M. ROUX-SPITZ, Architecte en Chef du Gouvernement, 1er Grand Prix de Rome.

Avec M. L. ARRETCHE, Architecte en Chef du Gouvernement.

Avec les Architectes : BARNIAUD, TEZENAS du MONTCEL, VAUGEOIS, le SAUTER de PARIS, NOVARINA de Thonon. »

Année 1924 :

Il réalise les plans de la maison du garde de la propriété du rendez-vous de chasse du Comte de KERGOLAY à Estées dans la Somme.

De 1923 à 1930, il travaille sur un autre bien de la famille de KERGOLAY : le Château de Septème.

Une restauration importante lui a été confiée : celle du Château de Septème dans l’Isère appartenant à Thibault de Kergolay (1879-1952).

Je n’ai pas retrouvé de plans de Paul concernant ce château, mais un certain nombre de photos sur la restauration intérieure, notamment la grande salle d’apparat avec ses peintures murales, ses moulures, les encadrements de fenêtre. Il s’agit d’un grand château fort du XI ème siècle, dont la construction progressive s’étale sur 800 ans. Le XIII ème siècle a vu l’édification des remparts. Une tour carrée de 40m sur 40m possède des murs de 4m d’épaisseur !

Son parc, ses dépendances et le château ont été classés au titre des Monuments Historiques en 1947. Pourquoi le nom de Septème ? Septième plutôt ! Un camp militaire romain fut construit le long de la voie romaine reliant Vienne à Milan au niveau de la 7e borne (au 7e mille). Le château fort a été bâti sur cet emplacement, à 30 km au sud de Lyon.                                                                                                                       Paul travaille à restaurer la grande salle d’apparat, le grand salon : les fresques sur les poutres datent du XVI ème siècle; les décors peints autour des fenêtres à meneaux sont refaites, les moulures également. Aujourd’hui, le château est toujours habité par la famille De Kergolay qui l’a ouvert aux visiteurs.

Paul très intéressé par l’histoire de ce château, a écrit un texte sur « La Seigneurie de Septème » qui est archivé à la  Médiathèque  » Le Trente » de Vienne, responsable des fonds patrimoniaux.

Le Comte de Kergolay lui écrit en décembre 1950 une lettre amicale et y joint l’attestation suivante :

« Monsieur Paul Bresse, architecte à Vienne, a dirigé les travaux de restauration intérieure du Château de Septème de 1923 à 1930 où sa science archéologique m’a rendu de précieux services. »

Année 1925 :

A Vienne, il agrandit le restaurant de Fernand POINT (1897-1955), un très cher ami : établissement appelé « La Pyramide », car situé tout près d’une obélisque qui ornait autrefois la spina du cirque romain de Vienne. Cet hôtel-restaurant de grande réputation, hôtel de prestige et table gastronomique « La Pyramide » est situé de nos jours : 14 boulevard Fernand Point, un  nom de rue qui lui ayant été consacré.

La plaque du nom de rue représente le blason de sa ville natale, Louhans en Bresse. Fernand Point a tenu cet établissement de 1925 à 1955. En 1933, il est le premier chef cuisinier à recevoir trois étoiles au Guide Michelin. Il a formé des cuisiniers français illustres : Paul Bocuse, François Bise et les Frères Troisgros (qui ne sont en fait que deux !). Pendant la guerre, il a préféré fermer son établissement, plutôt que servir l’Etat Major nazi qui voulait diriger son restaurant et s’installer à sa table…

Année 1926 :

Dès cette année-là, il va se voir confier plusieurs travaux dans la ville de Vienne.

Il réalise la décoration de la salle de la Montée des Epies.

Le 13 avril 1926, Le Nouveau Journal de Lyon publie ces lignes:                                       «… décoration  riche et sobre à la fois, où on sent la main d’un artiste de goût très sûr et affranchi des formules surannées. »

Il restaure l’Hôtel du Nord. Il enlève les volets, mais rajoute un balcon en fer forgé au-dessus de l’entrée et de petites corniches sous les fenêtres. Des bas-reliefs de têtes sculptées prennent place sur la façade au-dessus du rez-de-chaussée. Cette façade devient plus moderne, dépouillée, proche du style Art Déco de l’époque. Sa signature est gravée dans une pierre de la façade : « PAVL BRESSE  ARCH. 1926  ».

Cette année également le Journal de Vienne relève deux nouvelles nominations :

« Paul Bresse vient d’être nommé délégué du Comité du Groupement des Artistes-Décorateurs Lyonnais (sous-section de la Société du Louvre, pavillon de Marsan). »

« Il a été élu membre du Conseil d’Administration du Syndicat des architectes du Sud-Est (comprenant 18 départements). »

Année 1927 :

Il dessine un monument aux morts de la guerre de 14-18 de la paroisse de Saint-André-le Haut. Il a été placé dans l’église en face de la chaire. « Les noms glorieux sont inscrits sur le monument commémoratif, au dessous de la croix qui semble les couvrir de ses bras protecteurs, Monsieur le Curé explique que ce monument est dû à l’heureuse inspiration de Monsieur Paul Bresse. » : texte paru dans le journal Le Moniteur Viennois.

Et enfin, toujours à Vienne, Il réalise aussi cette année-là la cité HBM du Bayet.

Cinéma : 1927

Durant cette même année, Paul participe à une œuvre bien éloignée de l’architecture et de l’archéologie, l’œuvre d’un cinéaste ! « Royaume et Empire du Rhône», documentaire de Jean AURENCHE (1903 Pierrelatte-1992 Bandol), film réalisé en 1927.

En 1933, Jean AURENCHE réalisera un autre film : « Pirates du Rhône », toujours très attaché à ce fleuve.

Par la suite, Jean Aurenche est devenu un scénariste et un dialoguiste de films. Il a été l’auteur de presque 80 films de réalisateurs célèbres : Marcel Carné sur Hôtel du Nord en 1938, Claude Autant-Lara, René Clément, et surtout ceux de Bertrand Tavernier, disparu récemment : « L’Horloger de St Paul, Que la fête commence, Le juge et l’assassin, Coup de torchon, Un dimanche à la Campagne. »

Jean AURENCHE a pris comme assistants pour ce film sur le Rhône, Pierre CHARBONNIER, peintre reconnu et Paul BRESSE est un très bon ami de Pierre CHARBONNIER. Le peintre Max ERNST, son beau-frère,  est également présent…

Voilà donc ces quatre amis, embarqués sur un canot à moteur sur le Rhône. Il s’agit de suivre tout le fleuve de sa source au Mont Saint Gothard à son embouchure à Saint Louis.

Dès le mois de juillet 1927, la presse en parle : Petit Dauphinois, Excelsior, l’Intransigeant, Comoedia.

« Un jeune Ardéchois consacre au cinéma son activité intelligente et son esprit ouvert à toutes les nouveautés, M. Jean Aurenche, fils de notre excellent confrère, M. Louis Aurenche » : Nouveau Journal de Lyon, 02 juillet 1927.

« Dans une barque, les trois réalisateurs de ce film merveilleux suivront toute la vallée du Rhône. » : Nouvelliste de Lyon, 7 août 1927.

Le 15 août, l’Argus de la Presse donne des précisions : « Vues prises en avion, vues terrestres prises de l’avant d’un bateau, et aussi prises par un appareil automatique accroché à un cerf-volant. » Ancêtre du drone …

Le petit Dauphinois du 09.08 nous décrit déjà le film :

« Le scénario se déroulera en offrant aux yeux des spectateurs qui connaîtront ainsi mieux leur petite patrie, les pilles du Rhône (plies de ponts, bacs à traille, câbles, etc.), les pierres du Rhône (rochers, barrages, quais, châteaux, villages et villes, monuments antiques et modernes, les roues du Rhône (usines, industries, vapeurs), les bois du Rhône (forêts, arbres, bateaux, vignobles etc.) et enfin les hommes du Rhône (touristes, voyageurs, mariniers, jouteurs, boulistes). »

Le film a été terminé en août 1927.

Année 1928 :

Paul crée les plans d’une importante salle de spectacle et de cinéma à Vienne : la Salle Berlioz.

La créativité et le talent qui excellent dans ce travail seront unanimement reconnus. C’est une salle située 13 cours Wilson, pouvant accueillir 600 personnes. Les articles de presse sont élogieux :

Durant le mois de décembre 1928, paraissent plusieurs communiqués :

  • « Il faut rendre hommage à l’élégance de la salle. »: Le Progrès de Lyon 07.12.1928
  • « C’est une merveille de réalisation d’architecture moderne (….) On y accède par un hall élégant et sobre qui se prêtera ultérieurement à une judicieuse exposition d’art. » (…) L’éclairage à combinaisons multiples, enfermé dans des colonnes de verre dépoli qui le tamisent et lui donnent une grande douceur, est du plus bel effet. »: Nouvelliste de Lyon 07.12.1928
  • « La salle est très coquette, très bien aménagée ; nous avons remarqué des jeux de lumière vraiment merveilleux. » : Petit Dauphinois 08.12. 1928
  • « Paul Bresse a conçu plan et ornementation : excellente acoustique et un ensemble d’un goût parfait. »

Plus tard, les appréciations restent toujours excellentes : « Paul Bresse est un architecte qui  possède un goût très moderne et excellent, comme il n’en est pas à Lyon, d’une extrême sobriété. »

Même le chef d’orchestre Gaston Millet, directeur de l’Harmonie du Rhône et membre du jury du Conservatoire de Lyon, lui envoie une lettre de félicitation : « Le Théâtre Berlioz  présente les qualités les plus avérées d’une acoustique absolument parfaite. »

Comment Paul a-t-il pu concevoir et tester l’acoustique de la salle ? S’est-il entouré de collaborateurs à l’oreille absolue, ou a-t-il simplement réussi par des calculs mathématiques à concevoir l’acoustique de cette salle ? Ces calculs devaient porter sur la hauteur du plafond, les matériaux utilisés, la place de la scène etc. Personne ne le relève. Mais quelle victoire, quelle reconnaissance pour lui !

Année 1929 :

Vienne toujours ! Il est chargé de faire des études préliminaires en accord avec la Mairie et de réaliser « Un plan d’extension et d’embellissement de la ville de Vienne », comme le note Maurice FAURE, président à l’époque des Amis de Vienne.

Années d’avant guerre :

De 1935 à 1939, Paul collabore avec l’architecte renommé Michel Roux-Spitz qui a reçu Grand Prix de Rome en 1920 et qui est Architecte en Chef du Gouvernement.

Il  travaille sur la Bibliothèque Nationale de Paris, puis en 1937 sur les chantiers de l’Exposition Internationale de Paris comme dessinateur-calepiniste. Il est engagé par le Ministère de la Défense Nationale et de la Guerre, au Service Géographique.

Installé à Paris, il habite au 43 de la rue de l’Abbé-Grégoire.

Guerre de 39-45 :

 Parallèlement à son activité de résistant, Paul travaille sur de multiples projets de transformations, restaurations d’édifices.

  • Château d’Ampuis

Durant la guerre, il travaille sur  la  restauration du Château d’Arenc à Ampuis (Isère), magnifique bâtisse du XVI ème siècle au bord du Rhône, à 6 km en aval  de Vienne.

Ancienne maison forte du XII ème siècle, embellie en château d’agrément à la Renaissance, il a accueillit au fil des siècles plusieurs rois de France. Situé à une lieue de la cité antique de Vienne, le Château d’Ampuis jouit d’une situation exceptionnelle, blotti entre le Rhône et le vignoble ancestral de Còte-Rotie  , à 6 km au sud de Vienne.

Quelques précisions sur ses différents propriétaires : après l’origine de sa construction datant  du XII ème siécle, puis sa première rénovation par Pierre Ampuis au début du XIV ème iècle, c’est la famille de MAUGRON  qui occupa le Château d’Ampuis de 1512 à 1755 et lui donna ses lettres de noblesse. Ce sont ensuite les famille HARENC de la CONDAMINE, puis CIBEINS  qui lui permirent d’aborder lâube du XX ème siècle dans un état de conservation satisfaisant.

Malheureusement, au cours du XX ème siècle, cette belle bâtisse fut sérieusement négligée et ne reçut pas l’attention nécessaire à sa bonne conservation.

Ce Château appartient à l’époque à Monsieur Jack VIAL. Acquis par la famille GUIGAL en 1995, le Château d’Ampuis a fait l’objet, dès son rachat, d’une inscription a l’Inventaire supplémentaire des Monuments Historiques.

La famille GUIGAL est propriétaire des vignobles. Le domaine a toujours produit de grands crus dont le Côte- Rôtie, le plus ancien vin nommé de France cité déjà par Pline et Plutarque au premier siècle! Je retranscris quelques lignes des ces deux auteurs:

« On vient de découvrir une vigne dont le vin a naturellement le parfum de la résine de pin et fait la gloire de la banlieue de Vienne. » Pline (29-79 après J.C) livre XIV, chap.1er.

« On garde de la Gaule viennoise du vin empoissé que les Romains estiment beaucoup. » Plutarque (48 après J.C), Morale, livre V.

Dès 1940, Paul s’attelle à la restauration de ce château et de son parc en association avec Pierre BARNIAUD, architecte, et fait les plans des rénovations suivantes :

  • Création d’une porte d’entrée avec le monogramme de Jack Vial, J et V entrelacés.
  • Elaboration des plans du rez de chaussée et du premier étage.
  • Etablissement de plans pour les ateliers et magasins en 1941.
  • Réalisation du plan de la maison du Jardinier, pavillon du gardien au bord du Rhône.
  • Dessin de la balustrade de la grande terrasse en 1943.
  • Dessin des charmilles et roseraie en 1946.

Années d’après guerre :

  •         Monuments antiques de Vienne :

Dès 1945, Paul effectue des relevés et études de monuments antiques à Vienne : Eglise Saint-Maurice, Abbaye de St Pierre, et du Théâtre Antique Romain commandées par la Direction Générale des Beaux Arts.

  •   Cité des Chasseurs de Strasbourg :

Il conçoit pour la Cité des Chasseurs à Strasbourg, des maisons avec toute la partie du premier étage en bois. C’est une longue et belle histoire que celle de cette Cité….

Dans les années 30, la construction de petites maisons de briques, avec des fondations en béton est amorcée : 19 maisons sont bâties sur les 121 prévues dans le projet qui prévoit une cité jardin sur 60 hectares de terrain. Le chantier doit être interrompu pendant la guerre et reprend en 1948, le besoin de logements étant impératif. Mais voilà qu’en 1948, Paul  est affecté par la Direction des Services Départementaux de la Reconstruction et de l’Urbanisme comme architecte dans les départements de Seine, Seine et Oise, Ille et Vilaine. C’est probablement dans le cadre de ce poste, bien que Strasbourg ne soit dans ces départements-là,  qu’il  établit les plans des maisons de la Cité des Chasseurs à Strasbourg que l’on a aussi appelé « Le Petit Village Suédois », avec ses chalets colorés… Dès 1947-48, le Ministère de la Reconstruction et de l’Urbanisme s’attelle à reloger les habitants des villages bombardés, notamment Kehl.  La Cité Rotterdam voit le jour à Strasbourg, mais ses maisons sont petites et les familles nombreuses, qui ont jusqu’à dix enfants, emménagent dans les chalets de la Cité des Chasseurs dont les habitations sont plus spacieuses. L’OHLM (Office des Habitations à Loyer Modérés) en a la gestion. Les familles se plaisent beaucoup dans ce quartier où la qualité de vie est agréable : petits commerces, espaces verts pour les enfants,  convivialité  et entraide. Les habitants demandent à acheter leur chalet et dès 1960 deviennent propriétaires !

  • Saint-Malo :

En 1950, Paul travaille avec Louis ARRETCHE, architecte en chef de la reconstruction de Saint Malo sur l’Ilot 9 et 11 dont ils effectuent les plans. Je possède 7 plans et le plan de masse des immeubles HLM intra muros. Saint Malo avait été détruite par l’artillerie américaine qui a confondu la ville avec le fort de la Cité de Saint Sevran qui était une place militaire allemande !

« Le patrimoine ancien a fait l’objet de mesures de sauvegarde adaptées, en même temps que d’une tentative d’implantation d’une architecture nouvelle d’accompagnement. » comme le décrit Yvon BLANCHET qui a rédigé en 1965 un mémoire sur la reconstruction de Saint Malo. Louis ARRETCHE prévoit la reconstruction des quatre façades principales de la ville.  Je possède également les 13 plans du projet de reconstruction de la sous-préfecture de Saint-Malo.

  • Saint Lo :

Egalement, durant l’année 1950, Paul travaille sur la reconstruction de la Préfecture de Saint-Lo. Elle avait été détruite en 1944. En 1947, sa reconstruction est confiée à Louis ARRETCHE qui travaille avec Paul.  Le projet est soumis aux élus mais « les bâtiments épurés couverts de toits en terrasse sont jugés trop « avant-gardistes » ! Paul avait des conceptions modernes et novatrices… Je pense que Paul a dû retravailler son  projet intégrant colonnes, corniches et toitures à 4 pans en ardoise.

Ce sont les plans du bâtiment B que je possède. A-t-il conçu lui-même les trois bâtiments qui forment un ensemble en U ? Il manque beaucoup d’éléments pour retracer cette reconstruction. L’inauguration de l’ensemble préfectoral a lieu en 1953.  Je ne sais pas si Paul a également revu et transformé l’Hôtel du Préfet avec son mur de clôture et le bâtiment des services administratifs.

En 2019, cet ensemble est inscrit au titre des Monuments Historiques.

Châteaux :

Paul mentionne dans son CV les commandes concernant la rénovation de quatre châteaux :

« Restaurations de Châteaux Historiques : Château de Septème en Isère, Château d’Ampuis sur le Rhône, Château de Ste Croix en Saône et Loire, Château de Chauvigny en Loir et Cher. ».

J’ai parlé précédemment de ses travaux en 1923 sur le Château de Septème, et de ceux sur le Château d’Ampuis pendant la guerre. Je n’ai ni documents, ni plans de son travail  sur le Château de Ste Croix.

Il participe à la restauration du Château de Chauvigny  à Savigny sur Braye, dans le Loir et Cher,  en 1951. Ce château datant du XIXe  siècle ne doit pas être confondu avec un château fort médiéval appelé Château Barronnial de Chauvigny, datant du XIe siècle.

Paul refait l’escalier d’honneur de l’entrée. Il fait graver sa signature sur la première marche : et date : 14 août 1951. Paul a écrit sur la couverture du plan de cet escalier ces précisions: « Escalier d’honneur, composé de marches massives par l’entreprise Chauvigny-Peuron-Marbrier. Limon et mur d’échiffre en roche de Tercé. Le tout en taille adoucie. »

François de Chauvigny propriétaire de ce château devient un ami de Paul et ils échangent une correspondance de 1950 à 1954. Ils sont restés amis longtemps, jusqu’au décès de Paul. Par la suite, j’ai pu croiser plusieurs fois François de Chauvigny, aristocrate charmant, plein de générosité.

Collaboration avec l’architecte  Pierre TEZENAS du MONTCEL :

Différents travaux très variés le mobilisent en 1951 alors qu’il est associé à l’architecte Pierre Tezenas du Montcel : cinq projets sont élaborés cette année-là par Paul :

– Un pavillon de post-cure du Sanatorium de Cornusse (Cher)

Ce grand bâtiment, datant de 1903, a eu plusieurs fonctions: tout d’abord colonie de      vacances, il  a été un hôpital militaire en 1914-1918, et aussi en 1939. Puis la Croix Rouge le transforme sanatorium pour enfants atteints de tuberculose: Paul établit un projet pour la construction d’une aile de 66 lits ainsi qu’une autre aile pour les post-cures.

– Une grande cheminée de salon pour une maison à Brecey (Manche).

–  L’entreprise Uni Auto à Paris, au 24 de l’Avenue de la Grande Armée.

– A Nassandres dans l’Eure il fait les plans de la maison de la direction d’une sucrerie (qui a fermé tout récemment en février 2021) et comptait déjà 1000 ouvriers au XIXe siècle;

– Et toujours à Nassandres ceux d’une tour d’exercices pour la Compagnie des Sapeurs Pompiers !

Deux autres réalisations suivent :

  • Une imposante cheminée de salon pour le Domaine du Moulin à Cheyssieu en Isère.
  • Un Immeuble rue du Général Foy. Dans quelle ville ?

Collaboration avec Pierre BARNIAUD :

Dans les années 1950-1960,  il est associé avec l’architecte Pierre BARNIAUD et réalise de nombreux plans :

A Vienne, dès 1946, il effectue un avant-projet pour la transformation de l’immeuble « Les Maladières ».                                                                                                             A Cheyssière sur Auberives, Monsieur Jenthon désire une grande villa moderne  avec tour et cheminée… Paul en réalise les plans en 1954.

Durant l’année 1955, il dessine les plans de deux immeubles : « La Tour » à Grenoble en juin  et « La Tour » à Vienne en juillet sous la direction de l’architecte Maurice NOVARINA! Ces deux tours culminent à 14 étages de hauteur !

Il  fait les plans d’une maison à Conches dans l’Eure.

En 1956, il crée 24  logements à loyers économiques et familiaux (HBM) à Clichy-sous-Bois pour une société immobilière au nom bien poétique : « Notre Dame des Anges »…et un autre Immeuble HBM à Bondy.

Il réalise la salle paroissiale de Taverny, rue du Maréchal Foch, (Seine et Oise).

Il prévoit également  l’extension du bâtiment principal du Petit Séminaire de Versailles, 97 rue Royale.

Poursuivons avec l’année 1957 qui voit les réalisations suivantes :

L’église « Notre Dame des Champs » à Taverny. Cette petite église est bâtie avec des pierres blanches, le tour de ses fenêtres arrondies est  en brique rouge. Elle est très belle, date de 1934. En 1957, Paul établit un pré projet d’agrandissement de cette chapelle.

– La salle d’œuvres de la propriété de l’Association Diocésaine de Versailles à Saint Pierre de  Nonneville (Seine et Oise ).

l’Immeuble « Le Raincy » (Seine et Oise ) avec 8 logements prévus de 2 et 4 pièces.

Une grande propriété  pour Francis Berne à Rosny-sous-Bois.

– Un Immeuble : Le Pavillon Sous-Bois à Livry-Gargan.

– Réalisations pour l’Hôpital de Montfermeil : un laboratoire et une salle de mécanothérapie ; le pavillon d’habitation du directeur.

Continuons avec l’année 1958  et la naissance de deux pavillons:

Pavillon pour Monsieur Marchetti à Neuilly-Plaisance

Pavillon pour Monsieur Robert Huret à Livry- Gargan (Seine et Oise).

En 1960, il fait les plans de la « Chapelle Notre Dame de la Croix » à Maisons-Laffitte, encore une église qui lui permet d’innover, d’utiliser différents matériaux pour une chapelle surprenante d’équilibre et de modernité, magnifique édifice avec un plan triangulaire. Au-dessus de la porte d’entrée, abritée par un auvent, se dresse un haut clocher en pierres de taille surmonté d’un coffrage en lamelles de bois pour abriter la cloche.                                                                                                                            Suivent les plans de l’Ecole Saint-Louis, rue de Halléville à Enghien-les-Bains qui comprendra trois classes et un logement.

En 1961, il dessine le Pavillon Sous- Bois, immeuble collectif,  place de la Libération à Livry Gargan en Seine et Oise.

Il nous a toujours dit qu’il aimait faire les plans d’églises qui lui permettaient, je pense, une plus grande liberté de conception esthétique,  de choix de matériaux de construction. C’est en janvier 1962 qu’il élabore un projet pour l’extension  de l’ Eglise Sainte-Pauline au Vésinet (Seine et Oise).

Collaboration avec Maurice NOVARINA

En 1955 Il conçoit une très belle petite église en pierre à Ezy sur Eure. Les murs latéraux percés de grandes ouvertures longitudinales ; le projet a été confié à Maurice NOVARINA, architecte réputé de Thonon, mais je crois que c’est Paul qui en a dessiné les plans que je  possède.

En 2019 elle est classée au titre des Monuments Historiques, une année avant que le fils de Maurice NOVARINA, Patrice, réalise un clocher campanile, haute sculpture faite de tiges de  métal, avec une croix à son sommet et deux cloches qui y sont suspendues.

Je pense que ce nouveau clocher attenant à l’église n’aurait pas déplu à Paul, appréciant les réalisations artistiques modernes et audacieuses.

Dernier grand projet : contournement de Genève

On est en 1962, Paul a  71 ans, il ne réalisera plus de plans, mais se consacrera à un projet intéressant : « La Grande Ceinture de Genève ». Dès 1959, nous habitions une maison des années 30 dans une petite rue de Gaillard, village frontière avec Genève. La rue Paul Valéry se trouve entre deux douanes, Vallard et Moëllesullaz où nous allions à pieds prendre le tram 12 pour Genève.

Paul s’est passionné pour le projet de la construction de l’autoroute blanche conçu en 1968  et dont les travaux commencent en 1970. Il doit relier Mâcon à Chamonix. Il s’appelle autoroute des Titans pour le tronçon Bourg-en-Bresse / Bellegarde et Autoroute Blanche pour le tronçon qui va de Bellegarde à Chamonix.                              Genève, ne voulant pas être en reste, a voulu un accès rapide à cette autoroute dès Gaillard par la douane de Vallard.

Son quartier de Malagnou accède à cette grande douane qui entame la voie vers la vallée de l’Arve jusqu’à Chamonix.  L’autoroute a été construite en contre-bas de Gaillard et un pont traversait le village. Paul  se rendait souvent sur les lieux des travaux, très intéressé par ce chantier. En 1973, année de la mort de Paul, la section Vallard-Bonneville est inaugurée.

Un autre grand projet lui tenait à cœur : le contournement de Genève. Une autoroute de contournement sera au final inaugurée en 1993, reliant l’aéroport et la douane de Bardonnex. Mais depuis plusieurs décennies, le besoin était présent et les projets germaient. En 1960, une exposition est présentée au public genevois : « Voies urbaines et Futures »; le canton de Genève réalisait qu’il fallait désengorger la ville. La circulation  y était dense, les rues devenaient trop étroites pour un tel trafic, le passage d’une rive du lac à l’autre par le pont du Mont-Blanc connaissait déjà des bouchons. Genève est une enclave dans le territoire français avec une zone urbaine entourée de terrains agricoles.

Monsieur Muller-Rosselet, urbaniste donnait son point de vue : « La motorisation exagérée de notre canton ne doit  pas être considéré comme le Progrès en lui-même. », rejoignant un stand de l’exposition qui s’intitulait : « Grandeur et servitude des routes urbaines. »

 En 1964, année de l’Exposition Nationale Suisse de Lausanne, l’autoroute Lausanne-Genève est inaugurée. Ce projet s’inscrit dans une suite d’autoroutes (383 km) devant relier la frontière autrichienne (Saint- Margrethen) à la frontière française (Bardonnex) en traversant la Suisse. En 2001, le dernier tronçon sera achevé reliant Morat à Yverdon.

L’autoroute Lausanne-Genève avait un embranchement au Vengeron pour se diriger vers la douane de Vallard via l’autoroute blanche vers la vallée de l’Arve jusqu’à Chamonix. Comment contourner Genève ? Un projet avec un tracé court de pont au-dessus de la rade avait toujours été refusé pour des questions de coût de d’esthétique, et se voit définitivement rejeté par la Confédération en 1964. Une idée de tunnel sous le lac a aussi germé.                                                                                                              C’est en 1981 que le projet de contournement de Genève est adopté par le Grand Conseil et la Confédération. Douze ans plus tard, la voie peut être utilisée.

Pour anecdote, notons qu’il était même prévu de relier Rotterdam à Marseille ! Par voies d’eau, lacs, rivières, canaux… Visualisons son tracé : Rotterdam-Bâle-Aar-Neuchâtel-Léman-Genève-Seyssel-Lyon-Marseille. Ainsi, on aurait pu acheminer des denrées d’Afrique, des fruits, des minerais et on disait qu’« En 2000, Genève serait un port de mer ! »

Paul Bresse suivait tous ces projets, plans et contre verses de près. Il réfléchissait lui aussi à un projet de contournement de Genève en la reliant aux autoroutes voisines suisses et françaises. Il le réalisa et  travailla sur une carte existante de la région,  posant son calque sur les routes déjà tracées pour rejoindre Lyon, Grenoble, Chamonix.

20 ans après son décès, Genève peut être contournée par deux tronçons d’autoroute français et suisse. Paul n’aura pas eu la joie de les emprunter …

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