Sources :
Article de Reporterre : Train de l’Aubrac : mobilisation de la dernière chance pour sauver une « ligne de vie »
Wikipédia : Aubrac (train),
Article de AMIGA : Ligne du train de l’Aubrac
Wikipédia : Viaduc de Garabit
Wikipédia : Gustave Eiffel
Wikipédia : Jacques Antoine Charles BRESSE
Association des Amis du Viaduc de Garabit
Si rien n’est fait, les trains risquent de disparaître entre Clermont-Ferrand et Béziers. En effet, la ligne dite « de l’Aubrac » serait fermée à tous les trains de voyageurs et marchandises faute de travaux conséquents.
La gare de Saint-Chély-d’Apcher est silencieuse. Sous une pluie fine, l’Intercités en provenance de Béziers entre en station. La douzaine de voyageurs descend : terminus. Leur trajet ne peut se poursuivre que par autocar, direction Neussargues, dans le Cantal voisin, où ils pourront reprendre un train vers Aurillac ou Clermont-Ferrand. Depuis le 4 décembre 2020, en raison de l’état de délabrement avancé de la voie, la section de 56 km entre Saint-Chély et Neussargues est fermée jusqu’en novembre 2021.
Ouverte en 1888, électrifiée en 1932, la ligne de Béziers à Neussargues, dite ligne des Causses ou de l’Aubrac, serpente sur 277 km et dessert notamment Saint-Flour, Saint-Chély, Aumont-Aubrac, Séverac, Roquefort… Elle longe le plateau de l’Aubrac et la Margeride, traverse les causses de Sauveterre et du Larzac : des territoires ruraux, enclavés, très peu densément peuplés, au climat hivernal rude et au relief tourmenté. Elle figure au schéma européen de fret et présente un potentiel touristique fort. Actuellement et en temps normal, un unique train Intercités parcourt la ligne de bout en bout, sous le statut de Train d’équilibre du territoire (TET), financé à 50 % par la région Occitanie. C’est le seul train de voyageurs empruntant la section birégionale entre Saint-Chély et Neussargues (80 % étant située en Auvergne – Rhône-Alpes, AuRa).
Cette section voyait aussi circuler un train de fret qui, en temps normal, approvisionnait l’usine ArcelorMittal de Saint-Chély, spécialisée dans les aciers pour moteurs électriques. Il livrait chaque jour entre 35 et 50 bobines d’acier de 20 tonnes, les coils, issues des hauts-fourneaux de Fos-sur-Mer. Avec 300 emplois, ArcelorMittal est le premier employeur privé de Lozère. Aujourd’hui, l’usine est desservie par camions depuis Arvant, en Haute-Loire, à 75 km . « Si la ligne de l’Aubrac ferme, l’usine ferme », dit Nicolas Hinderschiett, représentant CGT. Il désigne les camions qui entrent et sortent de l’usine du matin au soir. « Et si l’usine ferme, le nord de la Lozère est condamné à un désastre social. »
« On arrive au bout du bout. Si la ligne de l’Aubrac tient, c’est grâce au fret, abonde Patricia Rochès, maire sans étiquette de Coren, village au nord de Saint-Flour et présidente de l’Association des Amis du viaduc de Garabit, l’Amiga. Alors que 15 millions d’euros (dont 10 d’argent public) ont été investis dans l’usine pour augmenter sa production, l’acheminement en coils par camion représente un surcoût et des difficultés logistiques. Intenable à long terme, d’autant qu’avec l’essor de la voiture électrique et hybride, « la demande est très forte sur le marché européen », souligne Nicolas Hinderschiett.
D’autre part, cette « ligne de vie » assure un transport scolaire essentiel en zone rurale, où l’enseignement agricole est bien implanté, que l’A75, gratuite, ne peut assurer avec la même fiabilité, surtout l’hiver. « Le train est vital pour l’existence de l’enseignement agricole public en Lozère », avertit Olivier Martin, directeur de l’établissement public local d’enseignement et de formation professionnelle agricole. L’enseignement agricole présent à Saint-Chély, Marvejols, La Canourgue et Saint-Flour, le long de la ligne, accueille des étudiants venus d’une large moitié Sud de la France et au-delà. « L’accès direct au train joue dans le recrutement des étudiants. Si la desserte était plus fluide, on pourrait recruter plus. Si la ligne venait à fermer, cela mettrait en péril les établissements. »
En mars, dans une lettre adressée au ministre des Transports, les présidents des six départements concernés relevaient que « tout a été mis en œuvre pour une extinction programmée de la ligne », ajoutant que « ce travail de sape commencé il y a 40 ans commence à porter ses fruits, la ligne est de moins en moins empruntée et le niveau de service totalement dégradé ». De longs tronçons hors d’âge, parfois vieux de 80 ans, sont encore équipés en rails « double champignon » sur des traverses en bois.
Autre point à surveiller, le viaduc de Garabit, géant de fer âgé de presque 140 ans, candidat au patrimoine mondial de l’humanité. « Garabit fait partie des investissements importants [à effectuer] », explique Patricia Rochès. Coût de la remise en peinture pour éviter la rouille : 15 millions d’euros.
Le viaduc de Garabit situé au dessus de la Vallée de La Truyère
Origine du projet
À l’origine du projet, l’idée d’un pont métallique à grand arc enjambant la vallée revient à un jeune ingénieur, Léon Boyer (1851-1886). Il impose l’idée d’un tracé direct de la voie ferrée sur les plateaux et un franchissement de la Truyère à grande hauteur (120 m au-dessus du niveau d’étiage), plutôt que la solution traditionnelle qui aurait consisté à descendre la ligne par les vallées affluentes pour franchir la Truyère par un ouvrage plus modeste, solution plus coûteuse en exploitation par la suite.
Pour ce franchissement, il était exclu de recourir au pont suspendu, à cause des risques d’oscillations provoquées par le vent, et il était impossible d’envisager techniquement à l’époque des piles de plus de 65 m de haut. Léon Boyer s’est inspiré de l’exemple du viaduc Maria Pia sur le Douro (Portugal).
Chronologie de la construction
- Novembre- : Léon Boyer effectue des levés sur le terrain pour définir le tracé de la ligne.
- : le premier projet établi par Léon Boyer est remis à l’administration.
- : le ministère des Travaux publics approuve le projet. C’est Jacques Antoine Charles BRESSE, inspecteur général des Ponts et Chaussées. A ce titre, il a présidé le jury qui a autorisé Gustave Eiffel à construire le viaduc de Garabit. Il a considéré que Gustave Eiffel devait prendre tous les risques financiers.
Le chantier de sa construction ouvert en se termine en et sa mise en service est effectuée en 1888 par la Compagnie des chemins de fer du Midi et du Canal latéral à la Garonne concessionnaire de la ligne. Cet ambitieux ouvrage métallique, long de 565 m, qui culmine à 122 m au-dessus de la rivière, est alors le « plus haut viaduc du monde » ; jusqu’en 1886, son arche était également celle ayant la plus grande portée au monde.
Le viaduc est construit pour supporter une voie ferrée et relier Paris à Béziers par chemin de fer, en passant par le Massif central. C’est donc depuis plus d’un siècle que l’Aubrac Express — nom du train ayant circulé sur la voie — surplombe à chaque passage la vallée de la Truyère. Le viaduc dispose d’une caténaire et supporte une voie unique. La vitesse des trains circulant sur le viaduc est limitée à 40 km/h pour réduire les contraintes de l’ouvrage.
- : ouverture de la portion de ligne Marvejols – Saint-Chély-d’Apcher.
- : premiers essais du viaduc en charge avec un convoi arrêté au centre de l’ouvrage.
- : ouverture de la section de ligne Saint-Chély-d’Apcher – Saint-Flour.
- : ouverture complète de la ligne.
- 1932 : électrification intégrale de la ligne de Béziers à Neussargues par la Compagnie du Midi, en 1 500 volts continu.
- : inscription aux Monuments historiques.
- : pour les 100 ans du viaduc une plaque commémorative portant la mention « A LEON BOYER, DE FLORAC, LES CANTALIENS RECONNAISSANTS » a été posée en mémoire de Léon Boyer.
- 1992 : le viaduc est entièrement repeint en rouge Gauguin de 1992 à 1998
- : la découverte d’une fissure sur l’une des piles de l’ouvrage lors d’une visite entraîne sa fermeture pour raisons de sécurité
- : réouverture, la vitesse des trains est alors limitée à 10 km/h sur tout le viaduc.
- : fermeture de la portion de ligne entre Neussargues et Saint-Chély-d’Apcher jusqu’au mois de décembre suivant pour permettre la réalisation de gros travaux sur le viaduc.
- : classé Monument historique.
Le viaduc de Garabit, bientôt patrimoine mondial de l’Unesco ?
La revue Aiguillages a publié une vidéo avec l’histoire de la ligne de l’Aubrac et du viaduc avec un interview de Patricia Vergne Rochès, présidente de l’association des Amis du viaduc de Garabit
Patricia Vergne Rochès a publié un ouvrage : Le viaduc de Garabit disponible sur la boutique de la Vie du Rail*
Comment agir pour le train de la ligne de l’Aubrac ?
L’association des Amis du viaduc a lancé un site spécifique « Urgence Aubrac » avec
- des actualités
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La pétition a déjà reçu 5500 signatures, il en faut 7500 pour qu’elle ait plus de chance de recevoir de l’attention de la part du décisionnaire !